Bien souvent, le futur acquéreur d'un cheval est angoissé à l'idée de peut-être se tromper sur le choix de sa monture. Et tient principalement compte, dans le choix de sa pension, plus de critères humains que de critères équins.
Je vais partir du raisonnement suivant, certes schématique, et sans doute abusivement « mathématisé » : si l'on considère qu'il faut « 100 unités » pour que l'aventure « équino-humaine » se développe favorablement ; en moyenne 33 unités seront dépendantes du cheval, 33 unités dépendantes du cavalier, et le dernier tiers, dépendant des circonstances et de l'environnement (au sens large). En exprimant les choses un peu différemment, je dirai qu'avec un cheval ni plus ni moins compliqué que la moyenne, avec un cavalier correct, se situant dans la moyenne (aussi bien techniquement que du point de vue de sa capacité à comprendre le cheval), dans un environnement ni plus ni moins favorable que la moyenne, les choses devraient se caler positivement entre le cheval et son cavalier. Par conséquent, on peut en déduire que si un de ces trois facteurs (cheval, cavalier, ou environnement) constitue un élément plus défavorable que la moyenne, pour que les choses évoluent favorablement, il faut que l'un des deux autres éléments (ou les deux) soit plus positifs que la moyenne. Exemple concret : si le cavalier est plus faible que la moyenne, cela doit être compensé par un cheval plus fiable/facile que la moyenne et/ou par un environnement plus facile.
Il ne me semble pas facile de définir le cheval plus fiable et plus facile : est-ce le cheval qui comprend vite ? Il aura peur une fois, puis aura compris que sa peur est infondée... mais, peut-être, comprendra-t-il vite qu'il peut faire ce qu'il veut avec un cavalier faible. Est-ce un cheval qui répond très bien aux indications de son cavalier ?... mais avec un cavalier imprécis, peut-être « sur-réagira-t-il » ? Doit-il manquer de « gaz », de réactivité ? Peut-être profitera-il de son cavalier en cessant toute impulsion... Doit-il être un cheval d'âge ? Peut-être est-il vendu parce qu'il a pris le dessus ou qu'il commence à avoir des soucis de santé et/ou des douleurs ? Cette évaluation et la définition d'un cheval facile est très subjective, et d'autant plus compliquée qu'un cheval évolue perpétuellement (voir autres chroniques, principalement la N°19 et la N°24) en fonction de son humain et de son environnement....
Le cavalier qui s'estime inexpérimenté ne devrait pas se contenter de chercher le cheval le plus facile. Il doit s'investir pour progresser dans la compréhension du cheval (voir chronique N°2). Disserter sur l'humain cavalier est un débat immense qui ne constitue pas l'objet de cette chronique.
Je vais donc m'attacher à définir au mieux les critères permettant à une pension de s'approcher de l'idéal... et de devenir un élément suffisamment favorable pour compenser d'éventuelles insuffisances du cheval et/ou du cavalier ; sachant que de la même façon qu'il n'y a pas de cavalier parfait, ni de cheval parfait... évidemment, la pension parfaite n'existe pas.
Les critères « humains » du cavalier sont bien sûr : le coût de la pension, sa proximité et la qualité des installations.
On néglige souvent les critères « du point de vue du cheval ». Je vais essayer ici d'en décrire une liste, non exhaustive évidemment.
Le premier principe est : plus on se rapproche des conditions de vie du cheval dans la nature, plus, mentalement et physiquement, le cheval sera mieux.
Le pré avec abri (et/ou des haies) où le cheval vit en troupeau (et a donc une vie sociale) semble l'idéal. Attention toutefois à la gestion des troupeaux. Y-a-t-il un dominant qui risque de blesser « mon cheval » et/ou de l'empêcher d'accéder au foin en hiver ? Y-a-il un cheval qui risque de vouloir se coller « au mien » et de m'empêcher de le ramener ? Y-a-t-il possibilité, si nécessaire de changer la constitution des troupeaux ? Le foin est-il disposé de manière à éviter les grandes mares de boue ? Y-a-t-il des érables sycomores qui risquent d'éparpiller leurs « feuilles-hélicoptères » dans les prés (risque de myopathie atypique).
Il faut être attentifs à l'état des herbages, se méfier des trop grandes herbes et hautes végétations diverses, plus propices aux tiques qui peuvent provoquer plusieurs maladies (piroplasmose, maladie de Lyme, ehrlichiose).
Les prés « surpâturés »... à éviter aussi. Le risque d'ingestion trop importante de parasites est accru.
Quels suppléments pour l'hiver ? Nous préconisons de consulter le site du vétérinaire nutritionniste Eric Ancelet (Ohm-bio-alternatives). Plus on se rapprochera de ses analyses nutritionnelles, plus, me semble-t-il, cela sera positif sur le long terme.
Combien de soucis (nervosité, tic à l'appui, ulcères, stress, coliques...) sont liés à une alimentation privilégiant la performance et/ou la facilité de distribution au bien-être du cheval sur la durée? Ne pas oublier que le foin doit être disponible à volonté.
Si le cheval doit absolument être au box, il faut qu'il ait la possibilité de régulièrement être lâché pour se défouler. Il faut que l'aération soit optimum, que le fourrage soit excellent... les risques respiratoires sont plus importants lorsque le cheval vit enfermé.
A vérifier : certaines pensions sont souvent tenter de disposer le foin en hauteur. C'est logique, le foin ne sera pas souillé et donc pas gaspillé. Oui, mais... Un cheval qui lève la tête pour manger n'est pas dans une position naturelle, il creuse son dos... Ce peut être un point néfaste à moyen et long terme.
Un petit rond de longe couvert et « bardé » qui permettra de s'isoler avec son cheval sans que celui-ci ne soit distrait par d'autres chevaux est un vrai plus.
La carrière idéale (outre le critère technique de qualité de sol) est celle qui permettra au cheval de rester concentré sur son cavalier. Une haie, derrière laquelle une agitation discontinue et parfois brutale se manifeste, perturbera l'attention du cheval et nécessitera, peut-être, de s'attacher à des exercices spécifiques de désensibilisation. Des chevaux qui s'agitent dans des prés et/ou des paddocks le long de la carrière, distrairont le cheval au travail, et provoqueront parfois des réactions de sa part.
Concernant la monte en extérieur.
Le départ vers les ballades : une allée encadrée par les prés où les chevaux s'ébattent provoquera plus facilement chez le cheval le désir de tester son cavalier qu'un chemin d'où il ne voit pas les autres.
Idéalement, s'il y a possibilité de croiser des voitures, il faut qu'il y ait des bas-côtés et/ou des échappatoires. Des routes bordées de fossés présentent également une difficulté au cas où le cheval commencerait à tester et/ou à "rétiver" : risquer que le cheval recule dans un fossé n'est guère rassurant.
Il faut être conscient que la monte en extérieur dans un environnement forestier est plus favorable qu'un environnement de larges plaines. La forêt "encadre" le cheval qui aura moins d'espace pour réagir ou "sur-réagir" en cas de surprise. La plaine peut-être grisante, et le cheval aura tout l'espace pour "décoller" en cas d'imprévu. D'autre part, dans un vaste espace ouvert, la "maison" (avec les copains) est longtemps dans le champ de vision du cheval et garde plus longtemps un caractère d'attractivité, au départ (le cheval est plus amené à tester) et au retour (le cheval va plus être tenté de « chauffer » pour hâter l'arrivée aux écuries).
Autre point : dans la « monotonie » des grands espaces, une petite anomalie (du point de vue du cheval), type souche bizarre, borne kilométrique, oiseau qui s'envole... prendra plus d'importance que dans des bois où la diversité de l'environnement rendra moins surprenant et/ou moins « anormale » les micros-évènements qui s'encadreront plus dans la linéarité forestière.
J'en reviens au raisonnement initié au début de cette chronique : à cavaliers d'extérieur moyens égaux et à chevaux moyennement faciles égaux, les probabilités que les choses évoluent favorablement sont nettement supérieures dans un environnement boisé que dans un environnement constitué de grands espaces ouverts.
Dans l'analyse du "contexte/pension", il ne faut pas négliger non plus l'importance des personnes responsables de l'établissement. Si celles-ci insufflent un esprit positif ("on va t'aider", "nous allons t'accompagner avec un cheval bien habitué aux lieux"...), forcément, les chances que le couple cheval/cavalier progresse sont importantes. Inversement, si l'entourage développe un contexte pessimiste ("le cheval est trop jeune", "trop vieux", "trop grand", "trop Pur-sang", "trop puissant", "le cavalier n'a pas le niveau"...), il est probable que s'il y a des difficultés, celles-ci ne s'arrangeront pas.
Je vais essayer de conclure en reprenant le concept initial des 100 unités à répartir entre le cheval, l'humain et l'environnement. Lorsque le cavalier éprouve des difficultés avec sa monture, il a souvent tendance à vouloir agir sur "la variable cheval" : soit en refaisant travailler le cheval (ainsi, ce ne sera plus le même cheval, celui avec lequel j'avais des difficultés), soit en changeant carrément de cheval. Ce qui n'est ni nécessairement une grosse erreur, ni forcément la "solution-miracle" ; c'est une option qui nécessite moins d'investissement personnel que de décider "moi, cavalier-propriétaire, je vais m'engager dans une profonde « réflexion-cheval »". L'option consistant à rechercher une pension dont le contexte rendrait les choses plus faciles, ainsi que décrit précédemment, me semble trop souvent négligée. Et pourtant, combien d'exemples où un environnement favorable a tout changé !
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