ECURIES  DU  MONT VERDUN  
POINTS DE VUE, IDEES, EXPERIENCES VECUES
Chronique N°2

"Je voudrais un cheval gentil, pas peureux, qui passe partout et qui pourrait convenir à un cavalier peu expérimenté."

Combien de fois ai-je entendu cette demande ? La personne qui émet cette requête semble penser qu'elle a consciencieusement accompli son devoir en précisant que son niveau est faible et que son acquisition devra s'adapter à ses capacités. Et si d'aventure, elle rencontre un souci avec le cheval qu'elle a acheté, elle se retournera contre le vendeur arguant du fait que sa monture ne correspond pas à sa demande. Cette attitude me semble caractéristique d'une auto-déresponsabilisation et d'un manque certain de réflexion. Essayons d'analyser ce qui entre en jeu dans le succès de la relation cavalier/monture.

Trois entités inter-dépendantes sont à considérer : le cheval, l'humain cavalier et les circonstances.

" Primo ", le cheval.

Le cheval, herbivore, proie, sera toujours susceptible d'avoir peur ; certains sujets réagiront brutalement, d'autres resteront figés, certains feront un écart au moindre bruissement de feuilles, d'autres ne manifesteront que rarement leur inquiétude ; mais ce n'est pas parce qu'un individu se montre rarement peureux qu'il ne réagira pas violemment.
L'équidé, être vivant et sociable peut préférer la compagnie de ses congénères à celle des humains. Il est probable qu'un jour il " testera " pour ne pas s'éloigner des " copains " ou pour simplement s'amuser avec son " jouet humain " ; il peut tester brutalement (cabrades…) ou faiblement (simple refus d'avancer).
Il peut être paresseux, dynamique (parfois jusqu'à avoir tendance à " embarquer "…).
Ces caractéristiques, lorsque nous décrivons un cheval à un client qui vient l'essayer, nous les énonçons en précisant bien qu'elles sont susceptibles d'évoluer, notamment en fonction des réactions et des erreurs du cavalier.

" Deuxio ", le cavalier.

Il doit avoir le niveau technique suffisant pour ne pas donner d'ordres contradictoires au cheval, et pour ne pas avoir à se concentrer sur son assiette. Un cavalier qui se tient " comme un sac à pommes de terre " pourra toujours essayer d'acheter un cheval pour débutant, il y a peu de chance pour que ce cheval reste une monture pour débutant.
Il doit avoir " l'envie " ce qui signifie, avoir assez de force de caractère pour relever les difficultés qui un jour surviendront. Il doit avoir un " intellect ouvert et imaginatif ", c'est-à-dire, être capable de trouver des solutions qui ne sont pas dans les livres, qui ne seront pas données par un moniteur, mais qui seront adaptées à la résolution de tel ou tel problème rencontré. Plus l'aisance technique sera faible, plus l'effort intellectuel pour être capable de décomposer les difficultés devra être important.
Sur ce point, notre expérience nous permet d'aider les cavaliers qui viennent nous voir en leur donnant quelques idées. Cela ne signifie pas que nous ayons une solution toute faite pour tous les cas.

" Troisio ", les circonstances.

Une circonstance défavorable - par exemple, un chien qui se jette soudainement contre une grille en aboyant, provoquant l'écart brutal du cheval et donc la chute de l'humain - peut faire perdre confiance au cavalier. Il est donc judicieux d'analyser l'environnement dans lequel le cheval sera monté et d'appréhender progressivement les difficultés.

En résumé :
Plutôt que de vouloir acheter le cheval qui n'a jamais peur et qui conviendrait à un mauvais cavalier, la démarche la plus judicieuse est d'accepter qu'il faudra réfléchir en se mettant à la place du cheval, qu'il faudra trouver le juste confort pour récompenser le cheval qui fait bien, le juste inconfort pour sanctionner le cheval qui se comporte mal, qu'il faudra en permanence évaluer les circonstances, comprendre ce qui est susceptible de provoquer la crainte, et savoir rassurer.
Il faut surtout admettre que l'on commettra des erreurs, qu'il faudra les corriger et que l'on a toujours à apprendre . Probablement plus de 90% des acquéreurs ne sont pas capables d'avoir un cheval qu'ils se considèrent débutants ou qu'ils exhibent fièrement leurs années d'expérience en club. Mais il faut avoir un cheval pour être capable d'en avoir un.

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